SEULE EN TETE-A-TETE FACE A NICOLE BELLOUBET, MINISTRE DE L’EDUCATION NATIONALE ET DE LA JEUNESSE

Dimanche 26 mai 2024

Nicole Belloubet,

Le 09 mai dernier, alors que vous étiez invitée par France Info, vous avez dû présenter vos « excuses aux familles qui ont été blessées » par les propos que vous avez tenus le 22 avril dernier.

« Un élève perturbateur, il peut être perturbateur parce qu’il est en difficulté physique ou parce qu’il y a un handicap », aviez-vous déclaré sur France 2. « Très clairement, c’était de la maladresse », assurez-vous pour votre défense. Vous allez même plus loin encore : « C’est d’autant plus maladroit qu’une de mes préoccupations premières dans notre école actuelle, c’est vraiment de mettre en place ce que l’on appelle l’école pour tous, c’est-à-dire l’école qui accueille tous les élèves, absolument tous les élèves ».

Je vous pose la question sans détour madame la ministre : si le Collectif Handicap, qui représente « 54 associations nationales », ne vous avait pas répondu par courrier daté du 26 avril, vous rappelant qu’ « un élève en situation de handicap n’est pas, par définition, un élève perturbateur », en ajoutant que « ce propos a choqué nos adhérents et les familles car il a été interprété comme une marque de méconnaissance des handicaps et de mépris pour des années de lutte en faveur d’une école pour toutes et tous », auriez-vous présenté vos excuses ? Vous seriez-vous seulement rendue compte de l’énormité de votre déclaration ?

« Bien sûr qu’il faut plus de moyens » pour accueillir les élèves en situation de handicap, avez-vous souligné. « J’en ai déjà : à la rentrée 2024, nous allons recruter 3 000 AESH [accompagnants d’élèves en situation de handicap] supplémentaires, et nous allons continuer en ce sens, bien sûr », promettez-vous…

Tout cela paraît partir de bonnes et belles intentions. Bien sûr… Mais, avez-vous seulement conscience, madame la Ministre, que tous les enfants porteurs d’un handicap ne peuvent pas suivre le rythme soutenu d’une scolarisation en milieu « ordinaire » ? Même accompagnés d’AESH ? Croyez-moi, je sais de quoi je parle : si je suis bachelière (même si ce n’est « que » la filière professionnelle), c’est essentiellement parce que j’ai suivi ma scolarité en milieu spécialisé (du jardin d’enfants au baccalauréat)… Alors, mon expérience personnelle m’autorise à vous présenter une proposition : Innovons ! Soyons précurseurs ! Sur la base du volontariat, scolarisons des enfants « normaux » dans des centres médico-scolaires ! Ainsi, ils se sensibiliseront aux « particularités » de leurs camarades porteurs d’un handicap, ils les aideront à sortir et à ranger leurs affaires et même (pourquoi pas ?) les accompagneront à leurs séances de rééducation…

Madame la ministre, avec tout le respect que je vous dois, écoutez cette proposition d’une humble concitoyenne qui a, contrairement à vous, cette expérience du handicap depuis quarante ans… C’est, selon moi, la seule solution pour que la société française de demain soit plus ouverte aux particularités de chacun de ses patriotes, pour que tous puissent vivre ensemble, sans préjugés, sans remarques désobligeantes, sans « maladresses »…

Jessica NATALINO alias « Plume Libre »